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New Girl contre WorkinGirls : la comédie arlésienne de la télévision française

La nouvelle comédie New Girl, avec une Zooey Deschanel pétillante, démarre ce soir sur M6… mais à 1 heure du matin !
Alors qu’on ne jure plus que par le rire et que les séries prennent toujours plus de place dans le prime-time de nos chaines françaises, il est un genre qui a pourtant du mal à s’imposer : la comédie. Notre PAF ne met en valeur quasiment que des shortcoms, les sitcoms américaines étant diffusées aux mauvaises heures, et les comédies ironiques et grinçantes restant cantonnées aux chaines payantes. État des lieux du rire en série à la télévision française.

Côté américain
Si l’audience des sitcoms est au top aux États-Unis, il faut guetter les grilles d’après-midi pour les voir à la télévision française. Qu’il s’agisse de The Big Bang Theory sur NRJ12, de How I met your mother sur NT1 ou de Modern Family, dont W9 diffusera bientôt la saison 4 inédite, toutes ces comédies à succès sont programmées en après-midi… par rafales de 4 ou 5 épisodes, voire de 11 à la suite dans le cas de The Big Bang Theory !
On est donc dans de la programmation bouche-trou. Et cela ne concerne pas uniquement les nouveautés : sur W9, les après-midi sont saturés d’épisodes de Ma famille d’abord, une sitcom avec Damon Wayans qui dura 5 saisons jusqu’en 2005. Tout comme l’increvable Friends dont les épisodes s’enchainent sur D8 et D17. Et sur les chaines historiques, ne cherchez pas : pas de trace de sitcoms, ou alors à des horaires totalement incohérents.
Pas étonnant que les fans se reposent sur le net pour découvrir dans de meilleures conditions (et en VO) The Crazy Ones, la dernière nouveauté avec Robin Williams et Sarah Michelle Gellar.

Côté français : plus c’est court, mieux c’est
Depuis le succès de Un Gars, Une Fille, la télévision française s’est fait la championne du programme court humoristique : la « short com ». Et elles se sont multipliées, de Caméra Café aux actuelles Nos Cher Voisins de TF1 ou Scènes de Ménages sur M6. France 2 est à la peine, malgré la qualité évidente de Parents Mode d’Emploi.
Mais toutes ces shortcoms ne sont ni plus ni moins que des suites de sketchs accolés les uns aux autres, et tiennent moins bien la route quand on les rallonge pour une diffusion en soirée. Le manque de scénario qui pourrait lier tous les gags se fait alors cruellement sentir.
Le cas de Fais pas ci, fais pas ça est carrément unique : d’abord lancée en format comédie classique sous forme d’épisodes de 26 minutes pour les fins d’après-midi de France 2, la série a eu du mal à trouver son public. C’est à partir de la saison 2 que le succès a enfin décollé, lorsque que les épisodes sont passés au format 52 minutes et ont été diffusés en prime time (par lot de 2 épisodes tout de même). Le tout sans sacrifier un vrai scénario et l’évolution de ses personnages.
Mais cet exemple reste sans suite : sur TF1 la plupart des comédies sont toujours produites sous forme de téléfilms de 90 minutes, qu’il s’agisse de Camping Paradis ou de Joséphine Ange Gardien. L’une des rares exceptions de la chaîne étant Mes amis, mes amours, mes emmerdes... qui a tenté le format 52 minutes.

Payer pour rire
Aux États-Unis, tout un type de comédies impertinentes s’est développé sur les chaines du câble HBO ou Showtime : Nurse Jackie, The Big C, Girls… Et c’est très naturellement sur des chaines payantes françaises qu’on les retrouve : Canal+ ou OCS.
Portées par la demande des abonnés qui payent pour voir ce que la télévision gratuite ne peut pas leur offrir, ces chaines se sont même lancées dans la production de leurs propres comédies sophistiquées destinées aux soirées. On pense notamment à Platane ou Kaboul Kitchen pour Canal+.
La chaîne cryptée vient aussi de lancer la saison 3 de WorkinGirls. Sous ce titre anglais, c’est pourtant une production française qui retrace la vie de bureau pour des femmes aussi excessives que possible : nymphos, coincées, autoritaires ou obsédées. « C’est l’adaptation d’un format hollandais, qui était composé uniquement de sketchs » raconte la scénariste Béatrice Fournera. « On a donc fait une première saison avec des sketchs, en conservant le côté caricatural des personnages. Mais du coup, on a évolué au fil des saisons. On arrive maintenant à des subtilités psychologiques. On raconte des histoires et on développe un fil rouge durant toute la saison. Cette évolution a été très naturelle. »

Evolution
En cela, WorkinGirls suit le même cheminement que la mythique Kaamelott d’Alexandre Astier, qui s’est aussi progressivement éloignée du sketch pour proposer des histoires plus structurées. Evolution aussi avec un spin-off puisque c’est de WorkinGirls qu’a été extraite la séquence de Sophie & Sophie, les deux réceptionnistes impitoyables qui trafiquent dans le dos des employés. Vous les avez certainement vues dans Le Grand Journal.
Alors qu’elle vient de décrocher le prix de la meilleure série au festival de Luchon, la comédie In America est, elle, diffusée le lundi soir sur OCS City. Ce road trip qui tourne à la catastrophe pour un chef d’entreprise et son beau-frère est une belle réussite. Sur le bouquet OCS, on attend aussi la saison 2 de Lazy Company, la comédie sur une troupe de soldats gaffeurs en pleine Seconde Guerre Mondiale, dont la diffusion devrait commencer le 31 mars.

Alain Carrazé, directeur de 8 Art City

Crédit photo : © 20th Century Fox Television