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The X-Files a 20 ans

C’est le 10 septembre 1993 que The X-Files débarque sur la planète série télé. Cela fait donc 20 ans que Fox Mulder et Dana Scully se sont rencontrés au sein du FBI et ont commencé à enquêter ensemble au département des « Dossiers X » (les affaires non-classées en VF), c’est-à-dire « la poubelle pour toutes les histoires dont on se moque » dixit Mulder dans l’épisode pilote.

Armés de leurs célèbres lampes torche dont le faisceau balaie systématiquement l’objectif de la caméra, ils vont être confrontés, durant neuf saisons et 202 épisodes, à des monstres en liberté, des parasites, des meurtriers et autres désaxés aux pouvoirs paranormaux… mais surtout à une conspiration globale dont le but est de préparer une invasion extra-terrestre.

20 ans plus tard, que reste-t-il de cette série ?

Un phénomène télévisuel

Née de l’imagination de Chris Carter, un scénariste que rien ne destine à cet univers sauf sa passion pour des séries d’angoisses du type Dossiers brûlants, The X-Files démarre en fait sans grand soutien et sans grand espoir sur la chaîne américaine Fox. Mais la série progresse de façon constante et plus particulièrement durant l’été 1994, au moment où la plupart des épisodes sont rediffusés. C’est à ce même moment que, timidement, M6 programme la série le dimanche, en fin d’après-midi, sous le titre Aux frontières du réel. Il faudra patienter encore deux ans pour que le phénomène qu’est devenue la série touche la France, que tous les magazines s’en emparent et que M6 la programme en prime-time le samedi soir. Ce faisant, The X-Files est ajouté au titre français qui disparaîtra peu à peu.

Au Mipcom 2012, où elle était invitée pour le lancement de The Fall, une nouvelle production policière dont elle est la vedette, Gillian Anderson m’avait confié : « On a beaucoup dit que The X-Files avait fait évoluer les choses, tellement la production était plus ambitieuse, plus coûteuse et plus soignée que ce que l’on avait l’habitude de voir, et que ça avait changé la télévision. Mais je n’ai vraiment mesuré son impact qu’une fois la série terminée. »

Le fantastique démocratisé

En effet, en 1993, le genre porté par la série est loin, très loin d’être un genre majeur à la télévision : extra-terrestres, fantastique et science-fiction sont rares sur le petit écran, car souvent synonymes de public trop restreint. En devenant un succès grand public, The X-Files fait voler en éclats ces idées reçues. La consécration arrive en janvier 1995 lorsqu’un Golden Globe la consacre meilleure série de l’année… face à Urgences et NYPD Blue ! La série joue sur le mystère, la peur et l’angoisse face à l’inconnu, et se permet de ne pas donner d’explications rationnelles aux phénomènes qu’elle retrace. Avant tout, le téléspectateur tremble et s’attache aux deux personnages centraux.

Comme Gillian Anderson le rappelle, la série a aussi fait faire un bond qualitatif à la mise en scène habituelle des séries télé. Éclairages soignés et ambiance souvent très sombre, plans sophistiqués, musique de Mark Snow particulièrement enveloppante… Tout y est pour donner un look inoubliable à la série. Dès la deuxième saison, la conclusion d’un double épisode nous montre un sous-marin pris dans les glaces en plein Antarctique, le tout recréé en studio !

Des effets visuels innovants

De même, la série a prouvé que les effets visuels, inhérents à ce genre d’histoires, n’étaient pas inenvisageables avec un budget de série télé. Profitant des progrès considérables faits dans le domaine des images de synthèse, la série démocratise l’usage de trucages que l’on pensait trop coûteux. À la même époque, une série comme Babylon 5 démontre, elle aussi, qu’on peut produire un space opera hebdomadaire en se reposant sur des effets créés par ordinateur. Aujourd’hui, cela peut nous faire sourire tant nous sommes habitués à ce que la moindre série télé soit bardée de plans d’effets spéciaux ou soit tournée sur fond vert !

Un peu contre son gré, The X-Files a aussi démocratisé la mise en place d’une mythologie dans les séries, et par là-même de productions plus feuilletonnantes. Cela était déjà le cas dans des séries comme Hill Street Blues ou Un Flic dans la Mafia – qui avait initié l’idée de « cycles » dans l’histoire –, mais The X-Files utilise cette option à son maximum. Si dès la première saison on trouve déjà des épisodes où les extra-terrestres et le grand complot sont évoqués, c’est vraiment à partir de la saison 3 que la série se scinde pratiquement en deux : d’un côté des épisodes isolés et de l’autre la grande mythologie qui, d’année en année, devient tellement chargée que les scénaristes y mettent fin au cours de la saison 7. Mais l’ambition existait bel et bien.

L’après The X-Files

Aujourd’hui, David Duchovny est la star de Californication et Gillian Anderson tient un rôle récurrent dans la série Hannibal. La grande majorité des scénaristes qui ont travaillé sur la série ont ensuite connu des carrières étincelantes : Howard Gordon et Alex Gansa sont à la tête de Homeland, et Vince Gilligan s’apprête à conclure Breaking Bad !

Chris Carter prépare, lui, The After, une série post-apocalyptique dont un pilote a été commandé ; il tente également de lancer la production d’un troisième long métrage tiré de The X-Files. Si le premier film (sorti entre les saisons 5 et 6) était satisfaisant - mais déroutant pour les spectateurs qui ne suivaient pas régulièrement la série - le deuxième a été une véritable catastrophe artistique et n’a eu aucun succès commercial.

La série, elle, reste inégalée et inoubliable. Dans l’histoire des séries télé, il y a eu un avant et un après The X-Files.

Alain Carrazé, directeur de 8 Art City

Crédit photo : © 20th Century Fox Television